Il se dit parfois que le premier jour de février se célébrait dans le monde celte la grande cérémonie d’Imbolc. Mais avant de lever nos verres pour honorer cette tradition, il serait bon de se pencher sur ce qu’elle représentait réellement et sur ce que l’on connait historiquement à son sujet.

Imbolc fait partie des quatre grandes fêtes connues dans le calendrier celtique, avec Samain (1er novembre), Belteine (1er mai) et Lugnasad (août, date précise incertaine). Une date importante donc, mais à propos de laquelle nos informations restent malheureusement maigres.

Vue d’artiste du héros Cuchlainn

Comme pour beaucoup de traditions de ce type, le premier réflexe est de se tourner vers l’Irlande, seule région d’Europe celte à n’avoir jamais subi d’occupation romaine et dans laquelle la survivance des coutumes et du folklore celte est donc bien plus forte. Cela permet parfois d’obtenir quelques pistes sur la situation antique, avec toutes les précautions nécessaires quant à comparer deux états géographiques et temporels différents d’une même culture.

En Irlande médiévale, à la date du 1er février se fêtait la Sainte Brigitte, sainte qui protégeait la maisonnée contre les tempêtes et les malheurs durant l’année, avec un rituel bien précis: des fagots sont réunis et l’on fait un mannequin qu’on habille et que le maître de maison fait se déplacer en demandant la purification du foyer. Avec cette paille, on tressera ensuite des croix et le mannequin sera remisé dans une grange, son manteau servant de protection pour l’homme -souvent pêcheur et donc le plus exposé- contre les tempêtes. C’est aussi l’occasion de nettoyer à fond la maisonnée, de donner de la paille fraiche aux animaux et de baratter du beurre, la fête n’étant pas considérée réussie si le beurre n’est pas présent.

Ces survivances indiquent plusieurs choses. Tout d’abord: la fête est dédiée à Sainte Brigitte dont le culte est aussi important que celui de Saint Patrick en Irlande, est une sainte de première importance et il est très probable, mais non prouvé, qu’elle soit la survivance chrétienne de Brigit, déesse mère de l’Irlande préchrétienne. Cela pourrait donc être une cérémonie à son honneur pour demander sa protection durant l’année. Ensuite, avec le nettoyage de la maison et les aliments mis en bon ordre, il serait possible d’avancer que cette cérémonie sert de purification pour le reste de l’année.

 

Gravure du XIXème des Saints d’Irlande, Sainte Brigite à droite.

Restitution du calendrier gaulois de Coligny

Toujours dans les textes irlandais, Imbolc est citée durant la grande histoire de Cuchulainn, héros des héros de l’Irlande celtique. Malheureusement les textes sont laconiques: il nous est dit que le champion aurait combattu sans repos du lundi de Samain au mercredi après Imbolc. Il dormira durant trois jours, durant lesquels Lug vient le guérir de ses blessures. Ce passage, certes très intéressant, n’offre guère d’informations mis à part qu’Imbolc est un repère temporel bien établi. Car si c’était Brigit, ou une déesse mère qui était venu le soigner, nous aurions pu élaborer des liens et des hypothèses, mais rien de tel ici.

Dans les autres sources, il serait possible de citer le calendrier gaulois de Coligny, qui sera utilisé jusqu’au IIème apr. J.-C., et dont des traces se retrouvent sur un grand pilier offert par une puissante congrégation de navigateurs à Paris: le Pilier des Nautes. L’étude de ce pilier tend à renforcer l’idée de la présence de cette fête sur le continent, mais n’offre aucune information sur les détails du culte.

En conclusion, Imbolc serait une fête de purification et de lustration, placée sous la protection d’une déesse-mère, bien que ce point est impossible à affirmer avec certitude. Les sources sont trop faibles pour pouvoir affirmer grand chose de plus sur les rituels accomplis, malgré la certitude de l’existence de cette fête.

Bibliographie:

  • JACOMIN B., Le pilier des Nautes de Lutèce, Astronomie, mythologie et fêtes celtiques. Paris, 2006
  • LE ROUX F., GUYONVARC’H C.-J., Les fêtes celtiques, Rennes, 1995
  • LE ROUX F., GUYONVARC’H C.-J., La civilisation celtique, Rennes, 2000
  • GUYONVARC’H C.-J.,Magie, médecine et divination chez les Celtes , Paris, 1997

Maquette du pilier des Nautes de Lutèce